Chronique de Richard Martineau aujourd'hui
Titre: Les Mutants
La semaine dernière, je vous parlais d'une adolescente dépressive qui s'est suicidée.
Jennifer, une belle fille de 15 ans qui aimait la danse.
Une amie de la famille m'a écrit suite à cette chronique. Sa lettre est un peu longue, mais je la publie presque intégralement, car elle pose de sacrées bonnes questions.
Un cancer
«Nous sommes allés aux funérailles de cette belle jeune fille dimanche dernier, écrit cette dame qui tient à garder l'anonymat. Ce qui m'a le plus choquée, c'est de me retrouver avec tant de beaux jeunes qui, à mon avis, éprouvent de graves problèmes de communication.
«Comment les jeunes peuvent-ils apprendre à développer une force de caractère, une forte personnalité quand ils passent la majeure partie de leur journée à pitonner sur un clavier? Ils ne peuvent voir le regard de l'autre, percevoir la véritable humeur ainsi que le non-verbal de leur interlocuteur.
«Ce cancer de la communication, comme je l'appelle, est devenu un phénomène parasitaire dans notre société, et malheureusement, je ne crois pas que l'ensemble des parents en soient conscients.
«Quand j'étais jeune, je jouais au Monopoly avec ma mère. C'est comme ça, avec de vraies personnes assises devant moi, que j'ai appris à perdre, à gagner et à gérer mes frustrations.
«Dire que dans quelques années, quand je vivrai dans un CHSLD, ce sont des gens de cette génération qui prendront soin de moi! Comment ferais-je pour faire comprendre mes besoins auprès d'eux, alors qu'ils ne sont pas habitués à négocier avec des personnes réelles?»
Éloge de la fuite
La dame soulève d'excellentes questions.
Se pourrait-il qu'en vivant presque toujours cachés derrière un écran, les jeunes finissent par être incapables de faire face à la réalité?
Un écran, ça protège. C'est comme un masque, un costume, un paravent.
Quand je suis mal à l'aise face à une situation, je zappe et passe à autre chose. Pas besoin de négocier, de discuter, de défendre mon point de vue ou d'entendre celui de l'autre.
Une pression de l'index, et je change instantanément d'univers et de conversation.
Je fais disparaître la personne devant moi et la remplace par une autre, plus conviviale, plus agréable.
Dans la vraie vie, il faut faire face à l'adversité, aux gens qui ne pensent pas comme nous, aux obstacles, aux difficultés, aux écueils, à l'imprévu.
Dans le monde virtuel, tout ça peut être évité.
Se pourrait-il que cela ait un impact sur les jeunes? Que ça les rende plus vulnérables, plus fragiles?
Une vraie présence
Et puis, il y a autre chose: quand on est déprimé, rien de mieux que des vrais amis, une vraie conversation, de vrais contacts pour reprendre goût à la vie.
Se toucher, se donner un câlin. Et, surtout, se regarder de longues minutes sans rien dire. Où sont les silences lourds de sens dans les textos?
«Les jeunes d'aujourd'hui ne font pas partie d'une nouvelle génération, répète souvent mon ami Lucien Francoeur. Ils font partie d'une nouvelle civilisation. Ce sont des mutants.»
Le hic, c'est que ce ne sont pas des mutants indestructibles comme le Terminator.
Mais des mutants hyperfragiles, qui fondent dès qu'ils quittent leur royaume virtuel.
Richard Martineau
Message
-
- Forum Admin
- Messages : 7576
- Inscription : lun. avr. 26, 2010 10:02 pm
- Localisation : laval
- Beavis
- niveau2
- Messages : 355
- Inscription : sam. nov. 12, 2011 4:36 pm
- Localisation : france afrique
Re: Richard Martineau
calimero a écrit :Chronique de Richard Martineau aujourd'hui
Titre: Les Mutants
La semaine dernière, je vous parlais d'une adolescente dépressive qui s'est suicidée.
Jennifer, une belle fille de 15 ans qui aimait la danse.
Une amie de la famille m'a écrit suite à cette chronique. Sa lettre est un peu longue, mais je la publie presque intégralement, car elle pose de sacrées bonnes questions.
Un cancer
«Nous sommes allés aux funérailles de cette belle jeune fille dimanche dernier, écrit cette dame qui tient à garder l'anonymat. Ce qui m'a le plus choquée, c'est de me retrouver avec tant de beaux jeunes qui, à mon avis, éprouvent de graves problèmes de communication.
«Comment les jeunes peuvent-ils apprendre à développer une force de caractère, une forte personnalité quand ils passent la majeure partie de leur journée à pitonner sur un clavier? Ils ne peuvent voir le regard de l'autre, percevoir la véritable humeur ainsi que le non-verbal de leur interlocuteur.
«Ce cancer de la communication, comme je l'appelle, est devenu un phénomène parasitaire dans notre société, et malheureusement, je ne crois pas que l'ensemble des parents en soient conscients.
«Quand j'étais jeune, je jouais au Monopoly avec ma mère. C'est comme ça, avec de vraies personnes assises devant moi, que j'ai appris à perdre, à gagner et à gérer mes frustrations.
«Dire que dans quelques années, quand je vivrai dans un CHSLD, ce sont des gens de cette génération qui prendront soin de moi! Comment ferais-je pour faire comprendre mes besoins auprès d'eux, alors qu'ils ne sont pas habitués à négocier avec des personnes réelles?»
Éloge de la fuite
La dame soulève d'excellentes questions.
Se pourrait-il qu'en vivant presque toujours cachés derrière un écran, les jeunes finissent par être incapables de faire face à la réalité?
Un écran, ça protège. C'est comme un masque, un costume, un paravent.
Quand je suis mal à l'aise face à une situation, je zappe et passe à autre chose. Pas besoin de négocier, de discuter, de défendre mon point de vue ou d'entendre celui de l'autre.
Une pression de l'index, et je change instantanément d'univers et de conversation.
Je fais disparaître la personne devant moi et la remplace par une autre, plus conviviale, plus agréable.
Dans la vraie vie, il faut faire face à l'adversité, aux gens qui ne pensent pas comme nous, aux obstacles, aux difficultés, aux écueils, à l'imprévu.
Dans le monde virtuel, tout ça peut être évité.
Se pourrait-il que cela ait un impact sur les jeunes? Que ça les rende plus vulnérables, plus fragiles?
Une vraie présence
Et puis, il y a autre chose: quand on est déprimé, rien de mieux que des vrais amis, une vraie conversation, de vrais contacts pour reprendre goût à la vie.
Se toucher, se donner un câlin. Et, surtout, se regarder de longues minutes sans rien dire. Où sont les silences lourds de sens dans les textos?
«Les jeunes d'aujourd'hui ne font pas partie d'une nouvelle génération, répète souvent mon ami Lucien Francoeur. Ils font partie d'une nouvelle civilisation. Ce sont des mutants.»
Le hic, c'est que ce ne sont pas des mutants indestructibles comme le Terminator.
Mais des mutants hyperfragiles, qui fondent dès qu'ils quittent leur royaume virtuel.
Elle n' allait pas a l' école?
Me semble avoir entendu le même discours contre la télévision.
Et aussi bien avant, les jeunes pecnots associables qui bossaient dans les champs....
Religieux les Simples D'esprit...Le royaume des neuneus leur Appartient!!!
- Ibraz
- niveau1
- Messages : 22
- Inscription : ven. nov. 25, 2011 4:14 pm
- Localisation : Constantine, Algérie
- Contact :
Re: Richard Martineau
Très bon post...
...car l’avancée est si lente vers l’incommensurable sagesse, qu’elle fait que l’homme sensé, ne ressente jamais vraiment qu’il n’ignore plus.